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GEOLOGIE ET ARCHITECTURE (1) - une histoire de la craie sénonaise -
La découverte dans les collines dominant la ville de Pont-sur-Yonne, de nombreuses grottes et cavités creusées dans la craie, certaines peu profondes juste des abris, d’autres plus creusées et enfouies sous les ronces, nous ont souvent intrigués, lors de nos « expéditions » enfantines des jeudis sans école : vestiges mystérieux, depuis longtemps abandonnés qui évoquaient l’existence de domaines souterrains que nous brûlions, enfants, de découvrir. Nous prélevions autour de ces « cavernes » de petits morceaux de craies, trésors qui nous servaient à tracer les marelles dans la cour goudronnée de l’école.
Depuis, les passionnés d’histoire locale (et de géologie) que nous sommes devenus ont fait le lien entre ces « grot tes » et l’omniprésence de la craie dans le paysage habité qui nous entoure. Ainsi au cœur ancien de Pont-sur-Yonne on la retrouve dans les caves des maisons, elle est présente dans nombre de constructions, quelquefois bien cachée sous un crépi gross ier de chaux, qui lentement se dégrade.
Même la petite église
de Saint -Martin-du-Tertre
est posée sur sa falaise de craie...
La craie est là dans les jardins dès que la bèche y pénètre. Les murs de clôture en conservent les moellons légèrement noircis souvent intacts et bien alignés. Sur ces murs les passants ont laissé des centaines de gravures et graffitis constitués de coeurs, de dates, de noms, de sigles ou de brefs slogans....
Des questions sont à l’origine de nos recherches d’aujourd’hui : qu’est-ce que la craie? comment et quand s’est-elle formée? comment les hommes l’ont-ils utlisée au cours des siècles ? et enfin qui étaient ces « mineurs de fond » car il reste très peu de traces des ces « travailleurs de la craie » dans la mémoire collective, de ces « crayeux » qui ont arraché au sous-sol cette roche si blanche, ni de leurs outils, ni de leurs conditions de travail : seules l'habitat ancien en témoigne encore et ces grottes et carrières abandonnées qui ont ponctué et ponctuent encore le paysage de la région.
1ère PARTIE- FORMATION DE LA CRAIE
La craie est une roche sédimentaire qui s’est déposée au fond d’une mer qui occupait notre région il y a 60 à 80 millions d’années (étage géologique crétacé supérieur) sur une épaisseur de 400 à 600 m
Elle est constituée d’une multitude de particules calcaires (nanofossiles visibles au microscope électronique) qui sont des restes d’éléments calcaires provenant d’êtres vivants, algues unicellulaires infiniment petites et nombreuses dont les parties dures (coccolithes) se sont rassemblées et fossilisées au fond de la mer pendant des temps très longs. Cette présence prolongée a permis le dépôt de plusieurs centaines de mètres de sédiments calcaires dans lesquels ont été ensevelis plus tard d’autres fossiles (micro et macrofossiles).
Ainsi, durant plusieurs dizaines de millions d’années se sont formées sur le fond des mers du crétacé supérieur autour de notre planète et en particulier dans notre région, d’extraordinaires étendues de craie constituée de centaines de milliards de ces coccolithes (du grec « cocco »signifiant « graine », et « lithe » signifiant « pierre » ).
La carte géologique de l’Yonne met en évidence la présence très importante de craie et de marne crayeuse du plateau sénonais. Il n’est donc pas étonnant que la craie constitue un des matériaux le plus utilisé dans l’architecture rurale de notre région. Partout elle affleure, les collines qui bordent la vallée de l’Yonne sont constituées par d’immenses bancs de craie, vestiges de l’ère secondaire, du temps du crétacé, bien avant l’arrivée des hommes. Même lorsqu’on s’éloigne de la rivière, en allant vers Michery, ou vers les autres villages bordant l’Oreuse on devine sa présence en sous-sol où de nombreuses carrières ont pu être exploitées jusqu'au début du 20ème siècle.
LA CRAIE ET SES FOSSILES
L'étage de la craie blanche (sénonien) présente la roche la plus pure, d'un blanc éclatant d'une épaisseur considérable (200 ou 500m ); dans laquelle courent souvent des cordons horizontaux de silex noirs ou des silex dispersés*. On y trouve des fossiles spéciaux dont les plus communs sont les Belemnites, les Oursins et les Eponges (trouvées souvent dans les silex)
* Les silex , souvent appelés rognons, sont constitués essentiellement d'oxyde de silicium (comme le quartz). La présence de ces "accidents siliceux" dans la masse calcaire que représentent les centaines de mètres d'épaisseur de la craie surprend encore les chercheurs et pose le problème de leur origine et de leur mode de formation. Ce sont des roches sédimentaires biochimiques : la silice en solution dans l'eau précipite et se fixe sur les éléments eux-mêmes siliceux de squelettes d'éponges, d'oursins ou autres animaux marins ..
Quelques millions d'années plus tard, les hommes préhistoriques ont su fracturer, tailler puis polir ces silex, en utiliser au mieux la dureté et les qualités tranchantes pour en faire armes et outils.
deuxième partie : CARRIERES et CARRIERS
troisième partie : PRESENCE DE LA CRAIE DANS L'ARCHITECTURE RURALE
quatrième partie: LE GATINAIS, de la craie à l'argile
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Commentaires
Simple et bien documenté, il donne envie de savoir la suite !
Merci !