• GÉOLOGIE et ARCHITECTURE (4) - LE GÂTINAIS

    chevaux2

    Après avoir traversé  l'Yonne et rencontré la « blanche Champagne » (1) et sa craie, un demi-tour du côté du couchant nous mène vers le plateau du Gâtinais. Pour l’atteindre, il faut gravir les quelques cent vingt mètres de dénivelé qui nous séparent de Saint Sérotin, passer de la vallée au plateau, de la craie à l'argile.

    église st sé sangliers 2 red

    La terrasse du « café des sangliers » est là pour  accueillir les marcheurs ou les cyclistes fatigués, en face de la modeste église de briques. «Sans grand intérêt » selon les guides touristiques, elle raconte, pour qui veut bien l’entendre, un peu de l’histoire du village. pommier jauneSur la carte de Cassini, l'église et son hameau  figurent déjà, ainsi que sur le cadastre de 1815. Mais c’est seulement en 1861 que Saint Sérotin devient commune, qu’on y construit une mairie et une école. Chaque village environnant va céder une partie de son territoire à cette nouvelle entité : Brannay, Lixy, Villemanoche, Pont-sur-Yonne, Villeperrot, Nailly  (on imagine bien les remous, discussions, empoignades qu’ont provoqués ces petites révolutions dans une population en majorité paysanne ; les archives communales de l’époque pourraient peut-être en témoigner).

     

     

    Un peu de géologie (2)

     

      La craie du crétacé (datée de 100 millions d’années) dont nous avons évoqué la formation dans un autre article forme le substrat de la région.mare Mais, bien visible dans la vallée de l'Yonne, la craie a ici tendance à disparaitre sous un manteau de terrains tertiaires de contour et d’épaisseur variables. routeCes terrains sont des poches argileuses ou sableuses.

     La région du gâtinais compte un grand nombre d'étroites routes ombragées et de chemins qui, dans tous les sens, sillonnent forêts et vergers ; on y trouve aussi de petites mares remplies d’eau de pluie, anciens puits d’extractionstamp 1 de l’argile au siècle dernier.

     

    Dans les champs, la craie est recouverte d’argile à silex. Le moindre chemin creux montre la craie en place sous cette couche d’argile peu épaisse. En plus des silex, des grès très fins, très durs, sont dispersés dans les champs sous forme de « pierres volantes », appelés « cliquarts ». Ils ont été abondamment utilisés pour la  construction des maisons paysannes au XIXème siècle.Roche Branlante

     

    On rencontre également, surtout dans la partie Nord-ouest de la région, en forêt de Villemanoche (bois de Vincennes et bois de Chatillon), de gros blocs de grès de formation plus récente (fin du tertiaire, soit environ 30 millions d’années). Il s'agit d'un grès aux formes plus arrondies, d'un grès plus tendre que le grès cliquart, que les géologues nomment grès stampien et les carriers grès franc. Champ BobinL’exploitation de ces grès a été très active dès le Moyen Age pour la construction des édifices religieux comme l'église de Pont-sur-Yonne, celle de Villemanoche ou celle de Brannay, et plus récemment pour le pavage et les trottoirs des villes.

    Le nom de ces gros blocPierre des Vertus-copie-1s disséminés dans la forêt, échappés aux fendeurs de grés, apparait quelquefois sur les anciens cadastres. "La roche branlante, la pierre sonnante, la pierre des vertus, lastamp3 pierre de minuit", autant de noms   évoqués  

    dans les histoires, légendes ou anecdotes recueillies par Pierre Glaizal au fil de ses rencontres avec les gens du pays et qui nous rappellent la richesse de l’imaginaire populaire (3).

    C'est parmi ces roches que l'on trouve également les "polissoirs néolithiques", témoins de la présence des hommes il y a 4000 ans (4). 

     

     L'architecture rurale en Gâtinais

     

    La plupmaison fontaines1art des maisons rurales gâtinaises datent du XIXème siècle. maison 2 fontaines retouch3Elles sont construites  avec les matériaux locaux.

    maison fontaines3-copie-1 Les murs sont maçonnés avec des  pierres ramassées dans les champs (cliquarts) ou extraites de petites carrières procheschainage d'angle vdb.

    Les encadrements de baies sont en briques ainsi que les chaines d’angles (qui peuvent aussi être en moellons de grès).

     L'ensemble est lié avec de la terre ou un mélange de sable et de chaux. enduit beurre vdbSeule la structure (chaine d'angle, bandeaux et encadrements de briques) reste apparente. Les enduits sont très souvent « beurrés », on dit aussi « à pierres vues », laissant parfois apparaître quelques pierres (l’enduit

    "à pierres vues" consiste à gobeter largement le mur et à racler au "nu" de la pierre avec le tranchant de la truelle le surplus de mortier).

    maison vdb

     

    ci-contre une petite maison rurale gâtinaise restaurée

    avec les encadrements des ouvertures en briques de la région, un enduit "à pierres vues" fait avec le sable de Brannay et un beau toit de tuiles de Bourgogne.

     

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    L'enduit constituait la couche de finition des maçonneries. Il avait pour fonction de protéger des infiltrations et de renforcer la solidité des murs construits en "tout-venant". Sa couleur plus ou moins ocrée, due aux sables de la région, donnait aux façades un supplément de lumière.

    pressoir rozoy le vieil

     

     

    Malheureusement il reste peu d'enduits d'époque.

     

     

    Il en existe des traces sur llorrez-le-bocagees murs de très anciennes bâtisses comme le pigeonnier du château de Lorrez-le-Bocage ou le bâtiment du  pressoir de Rozoy-le-Vieil.

      les provendiers 1

      crépi rose ancien aux Provendiers près de Paron

     

    Ci-dessous une maison ancienne dont l'enduit a été recemment restauré, auquel manque la patine du temps, mais qui permet d'imaginer l'aspect pimpant des maisons au XIXème siècle.   

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    Les toits en petites tuiles rectangulaires  dites "tuiles de Bourgogne" étaient, comme les briques, fabriquées avec l'argile de la région. Leur présence confère encore une grande unité de forme et de couleur aux villages.

     

    (1) "Blanche Champagne" est  le titre d'une exposition sur la craie qui fut organisée par l'Association Géologique Auboise en septembre 2010 à Nogent-sur-Seine.

    (2) Pour la rédaction de ce paragraphe, nous nous sommes inspirés des travaux de Jean-Yves Prampart de 1967 présentés dans le bulletin n°3 de la Société archéologique et culturelle de Pont-sur-Yonne (SACPY), "Géologie de la région de Pont-sur-Yonne".  

    (3) Voir Pierre Glaizal, "Pierres animées, trésors mythiques ou le temps suspendu",   Bulletin de la société d'histoire et d'archéologie n°26 (1998), Association "Les amis du Vieux Villeneuve". 

    (4) Les polissoirs néolithiques

    (6) Voir aussi  Vers un parc naturel régional du Bocage Gatinais ?

     

    Première partie  : UNE HISTOIRE de la CRAIE SENONAISE
    Deuxième partie : CARRIERES et CARRIERS

    Troisième partie: PRESENCE de la CRAIE dans L'ARCHITECTURE RURALE

     

     


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